Un mode d'accueil personnalisé à votre domicile encadré par des professionnels
Accueil > Blog > En accueil à domicile, le/la professionnel-lle doit créer les conditions d’une rencontre

En accueil à domicile, le/la professionnel-lle doit créer les conditions d’une rencontre

Pour ne pas se contenter de « garder » les enfants au domicile, les accueillants se sont professionnalisés. Cela a permis une évolution de leurs missions, dont le « soutien » à la parentalité. Pour qu’au quotidien les intéractions soient de qualité, chacun doit apprendre à connaître l’autre et établir une relation de confiance afin d’assurer la continuité des soins et favoriser le meilleur développement de l’enfant. Cela ne va pas toujours sans heurts.

Tous les jours, de trés nombreux parents confient leur bébé ou leur jeune enfant à des personnes étrangères à la famille. Pour être ancestrale, cette pratique s’est professionnalisée passant de nourricière (on en garde la trace de l’appellation « nounou ») à éducative ( on parle d’éducateurs de jeunes enfants).

Gardes à domicile diplômées de la petite enfance, auxiliaires parentales, intervenants-es (…) représentent autant d’appellations pour décrire ceux ou celles qui accueillent au quotidien des jeunes enfants, au domicile des familles. Ce quotidien comprend des temps de soin, d’éveil, de jeu, la rencontre avec des familles, des parents.

Le casse tête que représentent la recherche et le choix d’un mode d’accueil pour les parents, qui ne sont pas toujours préparé à confier leur enfant, souvent pressée par le temps et la société à retravailler, contraint les parents dans leurs choix et les conduit parfois à devenir employeurs. Qui choisir et comment ? Le choix d’un professionnel-lle de la petite enfance représente une plue-value dont ils ne sont pas toujours conscients. C’est à la personne recrutée de montrer aux parents par son action éducative (observations, actions et transmissions « orales et écrites ») que c’est un métier d’accompagner un jeune enfant dans les étapes de son développement et dans la séparation.

Revenons aux sources : garder est le verbe d’origine germanique, qui signifie « faire attention » au sens de « veiller sur », « protéger » que l’on peut rapprocher de la fonction d’assurer la sécurité physique de l’enfant, éventuellement affective; éduquer, du latin ducare, signifie conduire, encadrer. Quels sont les outils valorisant l’action éducative d’une personne chargée de la garde des enfants à domicile?

Un métier

Les relations de confiance tissées entre les adultes sont au coeur du bien-être des enfants. Du côté des professionnels, « accompagner un enfnt, à l’âge de sa grande dépendance à l’adulte, c’est accueillir sa mère et son père ». Les relations quotidiennes avec les parents dont une place importante dans leur travail du fait du jeune âge de l’enfant, mais aussi du fait du besoin légitime de reconnaissance. La qualité de ce lien dépend en grande partie de leur capacité à se rendre disponible, d’échanger régulièrement et de s’adapter à chacun. Il est important pour ces « accompagnants-tes » de pouvoir se positionner en tant que professionnels-lles de la petite enfanceet de se questionner sur les moyens à mettre en oeuvre pour permettre la « coéducation », la continuité pour l’enfant.

Du côté des parents, la séparation n’est pas toujours chose facile : « pour toute mère, se séparer de son enfant c’est accepter qu’il s’attache à un autre que soi. » Est-ce alors déléguer ou se décharger sur des professionnels-lles? Les parents ne savent pas nécessairement ce qu’un-e professionnel-lle peut apporter à leur enfant plutôt qu’une personne sans formation. Toute velleité de ces dernières à remplacer le parent absent sera souvent mal vécue. Professionnaliser son action permet, entre autres, de mettre à distance son rapport à l’enfant, par exemple en isolant les situations de transfert, les résonnances avec sa propre vie.

Accueillir et éduquer les enfants des autres, c’est devoir faire au quotidien avec les divergences et les ambivalences éducatives des parents. Certains parents peuvent avoir des exigences plaçant le professionnel en contradiction avec ses propres convictions. C’est aussi entrer dans l’intimité des familles, l’aspect du bébé témoignant des habitudes de vie et d’hygiène familiale. la suspicion manifestée parfois par les parents est à la mesure de cette intrusion. Finalement, « la confiance des parents n’est jamais acquise d’emblée; elle se construit peu à peu. Elle est à consolider en permanence. »

Un cadre

La réglementation des crèches, qui date de 1862, est longtemps restée fondée sur l’idée de protection. Toutefois, en 1982, un rapport montrait un changement de direction à travers une mutation sémantique. On était passé de la garde à l’accueil. Les décrets d’août 2000 et de mai 2002 traduisent une nouvelle approche d’une politique d’accueil des jeunes enfants tant du point de vue l’accessibilité de ces lieux que des objectifs poursuivis. Une approche plus ambitieuse, qui transforme les lieux de garde en lieux de vie constitués en appui aux parents. Si l’on transpose l’évolution de cette politique de la petite enfance aux modes de garde non-collectifs, dits à domicile comment peut-on envisager cet appui aux parents ?

Hors les murs

La mission de « soutien à la parentalité » consiste à aider les parents à s’acquitter de leur rôle de premier éducateur de l’enfant. Parents et éducateurs, partageant ainsi l’éducation des jeunes, doivent donc apprendre à se connaître et à établir une relation de confiance afin d’assurer la continuité des soins et favoriser le meilleur développement de l’enfant. La collaboration est essentielle. Il s’agit d’établir une confiance réciproque favorable à la mise en place de la séparation entre l’enfant et sa mère appelée à reprendre le travail. Cette coopération suppose de commencer par se rencontrer vraiment avant même de penser à agir ensemble. Elle représente un ensemble de connaissance à acquérir concernant la famille, l’enfant, ses habitudes, son rythme, les choix de ses parents, et leur choix de faire venir quelqu’un de l’extèrieur pour s’occuper de leur enfant dans son cadre de vie habituel. C’est finalement le pari d’une rencontre et d’un échange basé sur le respect et la confiance mutuels, la convivialité et même une conflictualité constructive.

C’est au professionnel de prendre la situation en main pour assurer le bien-être de l’enfant et construire cette confiance. Son travail est de proposer sans s’imposer, en respectant sans subir les choix éducatifs des parents. Le positionnement professionnel se réalisant dans un esprit de prévention quant au bon développement du jeune enfant. Trouver des possibilités d’alliance, et non pas faire pour les parents, à leur place. Trouver les mots et les moyens pour communiquer, sensibiliser les parents sur l’importance de la vie de leur enfant en leur absence.

« Si nous, professionnels, nous nous prenons à rêver de rencontres paisibles et harmonieuses avec les parents, nous risquons fort d’être déçus : le champ des rencontres est inévitablement un champ de tensions et d’intérêts divergents, voire conflictuels », nous rappelle Carlo Deana.

Pourtant, parents et professionnels sont appelés, davantage que par le passé, à oeuvrer ensemble pour le bien-être de l’enfant et dans son intérêt. Les raisons de ce changement sont à chercher dans les transformations profondes qui ont affecté la société dans ses fondements, ses institutions et particulièrement la famille, ses moeurs, son fonctionnement. Il n’en reste pas moins qu’aller à la rencontre des parents s’avère une démarche complexe qui demande aux professionnels de s’envisager dans une posture relativement inconfortable, tout à la fois arrimés à des repères solides et aptes au mouvement.

Il s’agit bien de créer un espace de rencontre pour faire avec les parents, faire ensemble, créer du lien, de définir l’intérêt de l’enfant. Bien plus, il est important d’accueillir, de recevoir, d’entendre sans juger, sans catégoriser, sans culpabiliser chaque famille. Il faut reconnaître la plue-value d’une action éducative professionnelle quotidienne quand la responsabilité et les pouvoirs éducatifs deviennent partagés, voire complémentaires et cohérents.

Article issu des Métiers de la petite enfance n°161
Pascale BLANC – Coordinatrice petite enfance, (92)